d’après Eugène Boudin (1824-1898) – Le phare de Honfleur (vers 1854 – 1860) – Fusain / Pastel sur papier gris – 24 x 32 cm
Comme tous les matins depuis 10 ans, Georges fait une balade du côté du phare. Ce qu’il aime par-dessus tout c’est son côté sauvage et effrayant, plus particulièrement les jours de tempête. La mer déchaînée fait mourir ses dernières vagues auprès du rivage. Les cloches sonnent à tout rompre et la lanterne pivote inlassablement pour prévenir les marins de l’approche des récifs dangereux. L’endroit peut, en effet, devenir mortel. Les vieux racontent des histoires de tous genres sur ce lieu mythique. Georges, écrivain de profession, a bien tenter d’écrire un ouvrage sur le sujet mais en vain. Alors que les langues se délient autour d’un verre, rapidement, elles se figent pour n’émettre plus aucun son. Il a essayé diverses approches ces dernières années, sans succès. Il s’est alors résigné et pour compenser il effectue son pèlerinage quotidien.Aujourd’hui, l’atmosphère semble particulière. Des mouettes ne cessent de tournoyer dans le ciel, à très basse altitude en émettant des cris rauques plus bruyamment que d’accoutumée. La houle est plus précipitée, sa musique est plus saccadée. Enfin, au fur et à mesure de son avancée vers la jetée, une odeur âcre, fétide, repoussante lui chatouille les naseaux. Lui, si sensible, supporte à peine ce mélange de pourriture extrême qui l’emporte sur celui enivrant de la mer salée. Il accélère malgré tout le rythme de sa marche pour en avoir le cœur net. Dans sa précipitation, il trébuche sur une algue, glisse et se retrouve nez à nez avec ce qu’il lui semble être une forme humaine. Il se redresse vivement et se remet péniblement sur ses pieds. Il se serait bien tordu la cheville dans la panique qu’il ne serait pas surpris. Il recule instantanément lorsqu’il prend conscience qu’il a devant ses yeux, à quelques mètres seulement, il pourrait presque le toucher en tendant le bras, un cadavre. Une femme, s’il se fie à son observation des longs cheveux recouvrant la totalité de son visage. La gorge sèche, les battements cardiaques battant la chamade, Georges est littéralement pétrifié. Il récupère son téléphone portable dans son pantalon. Il compose les premiers numéros de la police mais ses mains tremblent de manière tellement incontrôlée que le smartphone lui échappe et se fracasse sur un rocher, à proximité de la main gauche de la morte. Il se penche, aperçoit une bague à l’annulaire, originale, unique … Mon Dieu, c’est sa femme !
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