d’après Jean-Antoine Watteau (1684 – 1721) – Etude d’une femme assisse vue de dos (1716 – 1718) – Pierre noire / Sanguine / Craie blanche sur papier gris – 24 x 32 cm

Ses cheveux mi-longs aux reflets blonds vénitiens sont délicatement relevés en un chignon flou et dissimulés habilement par une voilette assortie à sa robe. Son maquillage discret souligne des yeux bleus éclatants légèrement en amande et une bouche pulpeuse, signe d’une enfance à peine quittée. L’adolescente assiste à son premier bal ce soir. Elle a 16 ans. Sa mère lui a acheté une robe la semaine passée pour son entrée dans le grand monde, comme elle dit. Eleanor est sous le charme d’une robe longue en taffetas de soie blanche incrustée de satin orange qui met en valeur sa fine taille de jeune fille et ses seins ronds et laiteux. Un gros nœud au bas de ses reins et des longues manches cintrée complètent parfaitement le vêtement qui ne laissera aucun homme indifférent quels que soient son âge et sa condition. Sa mère a un peu hésité mais le sourire envoûtant de sa fille aînée l’a convaincue. Alors qu’Eleanor se contemple longuement devant sa psyché, sa mère fait une apparition surprise, une boite dans la main gauche qu’elle tend doucement à sa fille. Cette dernière, mutine, ouvre le paquet soigneusement emballé. Dans un papier de soie blanc un collier de perle s’échappe. Leur éclat, leur douceur émeuvent aux larmes l’adolescente. Elle reconnaît instantanément le bijou figurant sur le tableau de son arrière-grand-mère maternelle, celui-là qui figure dans le couloir du premier étage parmi tous ceux de ses ancêtres.

 

La musique résonne le long des corridors. Il est l’heure pour Eleanor de faire son entrée dans le grand salon au bras de son cousin de cinq ans son aîné. Lorsque les portes battantes s’ouvrent, la jeune femme est tout d’abord éblouie par les lustres en crustal qui scintillent de mille feux, puis c’est tour des violons qui jouent sur un air de valse endiablée. Elle entend nettement les murmures féminins au fur et à mesure qu’elle avance au centre de la pièce. Pierre, son cousin, se met alors face à elle et enlace sa taille pour l’entraîner dans la folle chorégraphie qui fait tourner les têtes. Quelques tours suffisent pour être légèrement bousculés par un autre couple. Un homme gigantesque à la musculature saillante rattrape de justesse Eleanor par son bras frêle. L’emprise lui fait un mal atroce mais le regard noir pénétrant de l’inconnu la subjugue totalement et anesthésie instantanément la vive douleur. C’est le choix d’Eleanor.