Huile sur toile – 50 x 61 cm – Original

C’est l’histoire d’un moulin qui en avait assez de travailler. Il n’en pouvait plus d’avoir les pieds dans l’eau. Il aspirait à une autre vie dans un tout autre décor. Alors …

Par une nuit sans lune, où tous les chats sont gris, le moulin vert se décide de quitter, incognito, ce qu’il considère comme son enfer. Ses plus proches voisins, moulins tout comme lui, vont beaucoup lui manquer. Certains sont même devenus des amis très proches et sincères. Il ne leur a rien dit, bien sûr. Il ne voulait pas leur faire de la peine et surtout comment leur annoncer. Ils ne comprendraient pas.

La culpabilité de les quitter est vite remplacée par le sirop de la rue, ce goût nouveau de la liberté. Il traverse des routes, des villes. Il manque de se faire renverser par des camions pressés de livrer leur marchandise. Ce n’est pas si facile mais c’est tellement grisant.

Avant de partir, il n’a pas décidé de l’endroit exact où il allait s’installer. Il s’est dit qu’il allait aller tout droit et que le destin le mettrait sur la bonne voie. Il a confiance. Les nuages qui ont envahi le ciel depuis la fin de l’après midi commencent à se dissiper, laissant apparaître l’étoile du nord. Il va pouvoir plus ou moins se repérer et éviter de tourner en rond !

Depuis combien de temps marche t-il ainsi ? Le moulin l’ignore. Il sent la fatigue gagner ses membres inférieurs. Il a de plus en plus de mal à soutenir ses pales. Tout lui semble si lourd. Il commence à se décourager mais une petite voix intérieure lui souffle d’insister, de puiser jusque dans ses plus profondes réserves. Il sera récompensé, forcément.

La ville est loin désormais. Plus aucune lumière ne vient troubler le scintillement des étoiles. Il peut même distinguer la voie lactée. C’est de toute beauté. Il ne sait pas pourquoi, il s’en moque, il prend la décision de quitter le bitume, sur un coup de tête. Il tourne à droite et grimpe dans les hauteurs. Quelque chose de doux, de délicat, lui chatouille les pieds. Il ne voit pas assez clair pour déterminer ce que sait. Et puis il s’écroule, épuisé.

Le moulin vert est réveillé par le chant des oiseaux, il jette un œil autour de lui : un immense champ de tulipes.