d’après Le Greco (1541 – 1614) – Sainte Marie Madeleine pénitente (1576-1577)  – Huile sur toile – 61 x 46 cm

Et si derrière toute cette agitation, tout ce tumulte aérien, tout ce désordre météorologique, il existait un monde ailleurs ?

Madeleine, perdue dans ses songes, s’interroge. Serait-ce une vanité et rien de plus ? Le temps qui inlassablement s’écoule. Une mortalité inéluctable ? Un savoir qui s’étiole ? Une frayeur au plus profond de soi qui grandit et s’empare de l’âme telle une maladie incurable. Perchée sur son roc, forte d’une personnalité indestructible, la jeune femme n’ose croire au pire des tourments.

Soudain, une apparition. Comme un éclair furtif et éblouissant, le spectre s’attarde près de Madeleine quelques instants. Des murmures quasi inaudibles, des secrets à partager, des vérités à connaître. Surprise, inquiète, curieuse, avide, elle ne peut se résoudre à effacer ce souvenir. Est-ce réellement arrivé ? Ou bien était-ce un rêve ? Une pensée s’inscrivant définitivement dans son esprit ?

Soudain, une percée d’un bleu si vif dans le ciel. Parmi le gris menaçant et le blanc reposant, cette ouverture accueillante interpelle Madeleine. Elle y voit comme une invitation au voyage, comme un espoir mystique. Un « pourquoi pas » des temps modernes ?

Elle se met alors à imaginer des vertes prairies dans lesquelles elle se surprend à courir follement parmi les herbes hautes, trempées par la rosée du matin. Elle y rencontre des animaux fantastiques qui ne semblent aucunement avoir peur. Ils s’approchent imperceptiblement pour qu’elle puisse les toucher et laisser ses doigts errer dans leur douce fourrure. Elle se penche aussi sur des fleurs aux parfums envoûtants, aux couleurs vives et inconnues. Plus loin, vers l’horizon, c’est la mer. Aussi bleue que tumultueuse, aussi sereine que dangereuse. Elle descend un sentier escarpé pour la rejoindre. Sur son chemin, elle croise des femmes souriantes et douces, des enfants joueurs et insouciants, des hommes pressés et respectueux. Un halo de lumière les entoure, les protège peut-être aussi. Tant de questions taraudent Madeleine. Le sable brûle ses petits pieds fragiles. Elle rejoint au plus vite l’eau salée salvatrice. Elle s’y plonge entièrement jusqu’à se noyer. Se laver de ses pêchés ? Renaître de son passé ? Se baigner tout simplement ?

Soudain, un bruit épouvantable tire Madeleine de sa torpeur. Elle ouvre les yeux, lève la tête vers les cieux, protège son cœur …

Et si derrière toute cette agitation, tout ce tumulte aérien, tout ce désordre météorologique, il existait un monde ailleurs ?